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La crise de l’Université. Mort ou résurrection ?

Le mercredi 20 mai de 17 h à 19 heures, à l’amphithéâtre de l’EHESS, 105 Bd. Raspail 75006 Paris,

A l’occasion de la sortie du numéro 33 de La Revue du MAUSS, La crise de l’Université. Mort ou résurrection ?, les Editions La Découverte organisent une conférence de presse, qui sera également l’occasion d’un débat autour d’un Manifeste pour refonder l’Université française (voir le texte et les premiers signataires) impulsé par ce numéro et déjà signé par diverses personnalités représentatives de la communauté universitaire.

Interviendront notamment dans cette présentation et ce débat quatre des initiateurs de ce manifeste : Olivier Beaud, Alain Caillé, Marcel Gauchet et François Vatin.

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Intervention de circonstance

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Colloque : L’actualité de la pensée du P. Gaston Fessard

Avec la participation de :
P. Frédéric Louzeau, Faculté Notre-Dame de Paris ; M. Marcel Gauchet, EHESS; P. Michel Sales, s.j., professeur émérite.

Débat animé par:
P. Antoine Guggenheim, Collège des Bernardins.

À l’occasion de la parution aux Presses Universitaires de France de la thèse du P. Frédéric Louzeau, L’Anthropologie sociale du P. Gaston Fessard (1897-1978), suivie d’un inédit du P. Fessard, Collaboration et Résistance au Pouvoir du Prince-Esclave (octobre-décembre 1942).

Le P. Gaston Fessard (1897-1978), jésuite français, philosophe et théologien, a marqué l’histoire intellectuelle de la France par son discernement spirituel des grandes idéologies : libéralisme, communisme, nazisme. Interlocuteur de plusieurs grands intellectuels (Pierre Teilhard de Chardin, Alexandre Kojève, Raymond Aron, Henri de Lubac, Gabriel Marcel, Emmanuel Mounier, Jeanne Hersch, Claude Lévi-Strauss…) et spécialiste de Hegel, Marx et Kierkegaard, il a exprimé un ensemble de jugements d’une impressionnante lucidité sur l’actualité de son temps. La table ronde aura pour but de montrer que la pensée du P. Fessard demeure un puissant outil pour discerner les problèmes politiques et économiques de notre temps.

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La démocratie du privé perturbe le collectif

Libération, 28 avril 2009

Invité de Libération, Marcel Gauchet dresse le bilan de deux années de sarkozysme. Et réagit à l’actualité tout au long de ce numéro spécial.

Quel bilan politique dressez-vous des deux premières années de Nicolas Sarkozy à l’Elysée ?

Le sarkozysme est difficile à analyser, car il est caméléonesque. Il manie la contradiction sans complexe. En jouant sur tous les tableaux, il se rend insaisissable, ce qui explique que les protestations de la gauche le laissent indemne. Néanmoins, si on doit faire un bilan, on peut dire que le sarkozysme a probablement épuisé son capital initial et que s’il continue de faire illusion, c’est paradoxalement grâce à la crise, qui le prend à contre-pied, mais justifie, pour quelque temps encore, son activisme. L’essence du sarkozysme, c’est, sous le titre de la «réforme», l’idée que le moment est venu de banaliser la France, en économie, en diplomatie, dans l’éducation… C’est un programme de pasteurisation européo-libérale du pays, dont les deux armes principales sont d’une part la communication, que Nicolas Sarkozy manie en virtuose, et d’autre part la vitesse et l’emballement du rythme : réformes annoncées à jet continu pour déstabiliser les opposants, qui n’ont pas le temps de se mobiliser qu’on en est déjà à la réforme suivante ; multiplication des fronts pour brouiller les cartes, etc.

Cette formule serait en train de toucher à ses limites ?

J’en ai l’impression. D’une part, une bonne partie des prétendues réformes sont pour la galerie. Sarkozy sait marier comme personne l’intransigeance verbale et une gestion très chiraquienne des compromis. C’est un bonapartisme pour la télévision, où l’affichage de la volonté l’emporte sur la réalité. Ca ne marche qu’un temps et les limites de l’entreprise commencent à se voir. Ensuite, l’effet de surprise ne joue plus. La démarche se heurte à la résistance de l’exception française. Or celle-ci est solide. Elle repose sur une culture politique républicaine ancrée dans une vision très forte de l’histoire du pays. Sarkozy a eu tort de croire qu’il pouvait se contenter de concessions rhétoriques à ce noyau dur, avec les discours de Guaino. Il a sous-estimé la vitalité de ce cadre historique et mental. Aussi son action s’enlise-t-elle. Nous sommes en train de passer de la guerre de mouvement à la guerre de tranchées. La crise lui offre un répit qu’il a saisi avec son intelligence et sa souplesse habituelles. Elle fragilise son discours sur le fond, mais elle met en valeur son pragmatisme et son volontarisme, qui sont bien adaptés à la situation.

Les Français ne l’ont-ils pas élu justement pour ce programme de réformes ?

Les Français sont ambigus et contradictoires. Ils aspirent au changement car ils ont les réflexes d’une ancienne grande puissance qui ne veut pas abdiquer. Ils entendent rester dans le peloton de tête – de ce point de vue, le discours de Sarkozy a rencontré un écho profond dans la société. Mais ils veulent aussi rester ce qu’ils sont. Voilà pourquoi ils sont si réactifs dès qu’ils ont l’impression que l’on risque de toucher à ce qui constitue le cœur de l’expérience politique française. Dans le discours, Sarkozy a essayé de jouer sur les deux tableaux, en annonçant le changement tout en invoquant la France éternelle, de Jeanne d’Arc à Guy Môquet. Mais dans la pratique, ce grand écart s’est révélé intenable. L’histoire a disparu en route, au profit d’un changement souvent très ignorant des réalités françaises.

Le sarkozysme incarne-t-il une étape de la crise de la démocratie telle que vous l’analysez dans vos essais ?

Ce serait lui faire beaucoup d’honneur que d’y voir un phénomène historique significatif en lui-même. Le sarkozysme n’est qu’une conjoncture française, mais qui met néanmoins en lumière un élément sous-jacent de la crise de la démocratie : une volonté de pouvoir dont l’effet est une dévitalisation du pouvoir. Typique, par exemple, est la place démesurée donnée par le chef de l’Etat à la communication, comme si agir sur les images était transformer la réalité. Caractéristique, également, son impossibilité de faire le départ entre l’homme privé et sa fonction publique. Or une telle distinction, c’est l’âme même de la démocratie, où le pouvoir est dans les institutions, non dans les personnes. Chez Nicolas Sarkozy, la dimension institutionnelle est absente. L’autorité qui compte, à ses yeux, c’est la sienne, pas celle de l’Etat, dont il n’a pas le souci. Par ce trait, il incarne à merveille ce que j’appelle «la démocratie du privé», qui est un processus de désarticulation de la démocratie sous l’effet de l’individualisation et de la privatisation du monde.

L’idée que nous sommes passés d’une «démocratie du public» à une «démocratie du privé» est au cœur de votre réflexion actuelle. Qu’entendez-vous par là ?

Pour le dire abruptement, la question est de savoir si le collectif jouit d’une existence indépendante de celle des êtres qui le composent. Si oui, on peut lui donner une expression institutionnelle, une expression publique, distincte de l’expression privée des individus, qui ont par ailleurs voix au chapitre. Historiquement, c’est cette idée qui a longtemps prévalu. Elle a eu de beaux jours politiques, spécialement en France, où elle a constitué l’âme de l’Etat républicain. Dans ce cadre, les libertés individuelles sont supposées s’accomplir par la participation à la chose publique. Parallèlement, il est vrai, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis avaient développé des modèles plaçant l’accent davantage sur les libertés individuelles que sur la chose publique, sans ignorer le rôle de celle-ci. Mais depuis une trentaine d’années, cette tradition anglo-américaine s’est radicalisée et diffusée partout. La pente du monde est de remettre en question toutes les formes de collectivisation de l’existence politique, au nom de l’idée qu’il n’existe que les individus réels et leurs intérêts particuliers, et que c’est de leur interaction que doivent surgir les compromis acceptables pour tout le monde. C’est ce qu’on appelle le néolibéralisme. La chose publique, dans ce cadre, n’a plus de consistance par elle-même, elle n’est plus que l’instrument des demandes émanées de la sphère privée. Les institutions collectives sont discréditées, parce qu’elles sont toujours suspectes de ne pas prendre en compte les personnes concrètes. Sous couvert des mêmes règles, l’esprit du fonctionnement de la démocratie a complètement changé.

Néanmoins, la démocratie américaine se caractérise par des valeurs collectives très fortes : patriotisme et religion.

En effet. C’est, pour le coup, l’exception américaine : les Etats-Unis sont dotés d’une identité politique très forte et le pays où les libertés privées ont le plus de place. C’est fonction de la foi dans la «destinée manifeste» de l’Amérique et dans son rôle de puissance à l’échelle du monde. L’Etat-nation américain est projeté vers l’extérieur ; il n’organise pas la société à l’intérieur. C’est ce qui fait que la démocratie du privé coexiste avec une dimension publique axée sur le rayonnement des Etats-Unis. Les Européens, au contraire, ont abandonné toute politique de puissance et, dans leur démocratie sociale, le poids des institutions publiques est grand. Aussi chez eux l’irruption de la démocratie du privé est-elle très perturbatrice pour l’identité collective. Ils ne savent plus très bien où ils en sont. Autant, pour les Américains, la démocratie du privé se complète par un Etat tourné vers le dehors, autant, pour les Européens et en particulier pour les Français, elle se solde par l’incapacité d’assumer un héritage historique dont ils ne savent plus trop que faire, tout en y restant attachés.

La «démocratie du privé» s’accompagne d’une «oligarchisation» de la société, dites-vous, mais aussi d’une montée en puissance de la protestation. N’est-ce pas contradictoire ?

La démocratie du privé, ce n’est pas du tout le repli des gens dans leur foyer, le cocooning, la passivité : c’est l’alignement de chacun sur son intérêt d’individu et la légitimation absolue de celui-ci, donc de sa défense inconditionnelle. C’est dire que l’effervescence protestataire, la revendication et le contentieux sont garantis d’avance. Mais ces revendications campent sur leur particularité, en se plaçant à l’extérieur du politique. La protestation s’en remet en fait aux responsables et leur dit : «Voilà ce que nous voulons, débrouillez-vous pour trouver les moyens». Le mot-clé est résister. Mais si vous ne formulez pas de propositions, si vous ne prenez pas en charge le point de vue de l’ensemble où votre réclamation doit s’inscrire, ce sont les gouvernants qui le font pour vous. Le problème de cette formule, c’est qu’elle ne permet pas de remonter au collectif. Elle exige, mais délègue aux hommes politiques le soin de décider : ainsi, la protestation secrète naturellement l’oligarchisation. Du reste, le personnel politique s’accommode de la situation. Il a compris que si elle est parfois inconfortable, elle lui laisse les cartes bien en main. Le divorce entre le haut et le bas se creuse. Car les citoyens continuent dans le même temps d’aspirer à une grande politique. On a vu à l’occasion de la dernière élection présidentielle que leur attente était intacte. Les électeurs aspirent à une puissance du politique que toute leur pratique au quotidien a pour effet de rendre impossible. D’où le sentiment général d’une dépossession incompréhensible.

Comment s’en sort-on ?

D’une part, il ne faut pas sous-estimer la prise de conscience par les individus des contradictions et de l’impasse dans laquelle ils sont. Les gens ne sont pas stupides, ils voient bien que quelque chose coince. Car cette équation impossible, on la trouve à tous les niveaux : dans la famille, à l’école, dans l’entreprise. L’évolution du syndicalisme, par exemple, est significative. Mais ce mouvement des mentalités ne suffit pas à faire bouger les choses à lui seul. C’est la rencontre avec les circonstances historiques qui précipite le changement, dans les moments de choix qui font apparaître la nécessité de reprendre en compte le collectif. En la matière, nous avons tout ce qu’il nous faut sous la main : la crise financière, le défi écologique, le blocage européen, le déséquilibre des systèmes sociaux. L’art du politique, c’est de conjuguer ces deux forces.

La crise financière est-elle un autre symptôme de la «démocratie du privé» ?

Elle est le symptôme économique de la dérive politique entraînée par la confiance illusoire dans l’autorégulation des intérêts individuels. Elle fait apparaître la vacuité de ce rêve d’agrégation automatique. La vérité est qu’un monde mondialisé a plus besoin que tout autre d’une organisation. Savoir laquelle va nécessiter du temps, mais tel est le but qu’il faut se fixer et c’est dans une telle optique qu’on peut par exemple parler de protection économique.

Est-ce le nouveau rôle historique de la gauche ?

Autant je ne vois pas de raison de désespérer à long terme, autant je suis obligé de constater, en ce qui concerne la France actuelle, que nous sommes au plus bas. Nous payons le prix du mitterrandisme, qui a été le visage sous lequel la France a défini pour longtemps son attitude face à ce changement de cap du monde. Elle a commencé par le refuser, sous Giscard. Puis, dans les années 80, tandis que le Royaume-Uni avait élu Thatcher et les Etats-Unis Reagan, est arrivé Mitterrand, qui a installé une culture de la dénégation, consistant à s’adapter à la nouvelle donne, mais sans le dire. Les socialistes français en sont toujours là : ils ont la particularité d’être à la fois très rigides doctrinalement et très cyniques en pratique. A leur décharge, il faut dire que Mitterrand avait cru trouver une échappatoire en jouant l’Europe : puisque le modèle français était condamné, il a voulu construire à un échelon européen une nouvelle synthèse du libéralisme et de l’Etat fort. Faire une Europe française, en somme. Dans les années 80, le projet européen a été le grand espoir de la société française. Mais il se trouve que le projet a échoué : l’Europe telle qu’elle s’est développée n’est pas française, on peut même dire qu’elle est anti-française, tout simplement parce qu’elle reflète la réalité d’un monde qui va spontanément à rebours de notre héritage historique. Le désenchantement qui s’en est suivi vis-à-vis de l’Europe a été spectaculaire. Depuis, personne n’a fait l’effort de reprendre le problème à la racine. Jospin, qui semblait l’avoir compris, n’a pas osé. Ségolène Royal est passée à côté. La panne est complète.

Les deux grands courants concurrents du PS – le pôle écologiste et libertaire et la gauche radicale – vous semblent-ils porteurs de promesses ?

Non, pas la moindre, hélas ! La gauche radicale est une rémanence de notre histoire. C’est la Révolution française qui revient, par-delà le communisme. Besancenot nous propose un néo-hébertisme et Badiou nous réinvente Babeuf et sa Conjuration des Egaux. Tout cela bouillonne, exprime des choses profondes, mais n’offre guère de perspectives opératoires. Quant à la liste commune Cohn-Bendit-José Bové, la contradiction de la nouvelle démocratie individualiste du privé y atteint son sommet. Il n’y a vraiment que sur le papier que le souci écologique et la radicalisation des droits personnels collent ensemble !

Critiquer les droits de l’homme, n’est-ce pas encourager des formes politiques autoritaires ?

Je ne critique pas les droits de l’homme, je critique l’usage qu’on en fait, ce qui est fort différent. Ils sont indiscutables dans leur ordre, mais ne fournissent en rien une réponse générale, immédiate et totale aux questions qui nous sont posées. Ils établissent la base de légitimité du pouvoir dans nos sociétés ; ils énoncent ce qu’on ne doit en aucun cas violer et ce vers quoi nos sociétés doivent tendre, en tant que sociétés d’individus. Mais en aucun cas ils ne définissent le système politique ou l’organisation sociale qui permettront d’assurer leur développement. Les droits de l’homme sont le fondement et le but, pas le moyen. Ils ne nous dispensent pas, comme l’illusion du moment le fait croire, de réfléchir sur l’ordre politique et sur le fonctionnement de la société en tant que tels. Si l’idée de socialisme doit retrouver un sens vivant, c’est du côté de cette conjonction qu’il faut le chercher.

Propos recueillis par Éric Aeschimann et Laurent Joffrin

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Entretien, Intervention de circonstance

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L’autonomie veut dire la mise au pas des universitaires (Le Monde)

Le Monde, 23 avril 2009

Dans votre dernier livre, « Conditions de l’éducation », vous mettiez l’accent sur la crise de la connaissance. Le mouvement actuel dans l’enseignement supérieur n’en est-il pas une illustration ? 

L’économie a, d’une certaine manière, dévoré la connaissance. Elle lui a imposé un modèle qui en fait une machine à produire des résultats dans l’indifférence à la compréhension et à l’intelligibilité des phénomènes. Or, même si c’est une de ses fonctions, la connaissance ne peut pas servir uniquement à créer de la richesse. Nous avons besoin d’elle pour nous aider à comprendre notre monde. Si l’université n’est plus du tout en position de proposer un savoir de cet ordre, elle aura échoué. Or, les savoirs de ce type ne se laissent ni commander par des comités de pilotage, ni évaluer par des méthodes quantitatives.

N’est-ce pas pour cela que la question de l’évaluation des savoirs occupe une place centrale dans la crise ?

Alors que les questions posées par les modalités de l’évaluation sont très complexes, puisqu’elles sont inséparables d’une certaine idée de la connaissance, elles ont été réglées de manière expéditive par l’utilisation d’un modèle émanant des sciences dures. Ces grilles d’évaluation sont contestées jusque dans le milieu des sciences dures pour leur caractère très étroit et leurs effets pervers. Mais, hormis ce fait, ce choix soulève une question d’épistémologie fondamentale : toutes les disciplines de l’université entrent-elles dans ce modèle ? Il y a des raisons d’en douter. Ce n’est pas un hasard si les sciences humaines ont été en pointe dans le mouvement. Il s’agit pour elles de se défendre contre des manières de les juger gravement inadéquates. L’exemple le plus saillant est la place privilégiée accordée aux articles dans des revues à comité de lecture qui dévalue totalement la publication de livres. Or pour les chercheurs des disciplines humanistes, l’objectif principal et le débouché naturel de leur travail est le livre. On est en pleine impasse épistémologique.

Toutefois, la source du malaise est bien en amont des textes de réforme qui cristallisent aujourd’hui les oppositions.

L’université souffre au premier chef de sa mutation démographique. Elle a mal vécu une massification qui s’est faite sous le signe de la compression des coûts et qui s’est traduite par une paupérisation. Il faut bien voir que nous sommes confrontés ici à un mouvement profond, qui relève de l’évolution des âges de la vie, et qui étire la période de formation jusqu’à 25 ans. L’afflux vers l’enseignement supérieur est donc naturel, indépendamment du contenu offert. Etant donné la culture politique française, dans l’imaginaire collectif, l’université devient le prolongement naturel de l’école républicaine gratuite et presque socialement obligatoire. Je ne crois pas plausible de maintenir le modèle de cette école républicaine jusqu’à 25 ans mais je comprends pourquoi les gens y croient. C’est même constitutif de notre pays. Mais cette spécificité en rencontre une autre, qui joue en sens inverse, à savoir l’existence d’un système à part pour la formation des élites, celui des grandes écoles. Il s’ensuit que nos dirigeants, issus en général de ce circuit d’élite, sont peu intéressés par l’université, quand ils ne la méprisent pas.

Notre université paie donc le prix d’une spécificité hexagonale ?

Ce partage universités/grandes écoles pèse très lourd. Partout ailleurs, le problème de l’université est vital puisqu’il y va de la formation des élites. Mais pas chez nous, la bourgeoisie française disposant d’un système ultra sélectif de grande qualité pour la formation de ses rejetons, qui a de surcroît l’avantage unique d’être gratuit. Mieux : on peut même y être payé pour apprendre – voir Polytechnique ou Normale Sup. L’université de masse, en regard, tend à être traitée comme un problème social. Nos gouvernants viennent de découvrir qu’elle était aussi un problème économique. Mais leur regard reste conditionné par le passé : ils veulent des résultats pour pas cher.

C’est sur un terrain déjà bien miné qu’arrive le mot nouveau d' »autonomie » ?

Ce mot admirable que personne ne peut récuser n’est qu’un mot. Il est illusoire de croire que parce qu’on a le mot, on a la chose. Demandons-nous ce qui se cache derrière ses promesses apparentes. Pour avoir une autonomie véritable, il faut disposer de ressources indépendantes. Or, en France, c’est exclu, puisque le bailleur de fonds reste l’Etat. On peut certes développer des sources de financement autres. Elles font peur à un certain nombre de mes collègues, mais je les rassure tout de suite, ça n’ira jamais très loin : le patronat français ne va pas par miracle se mettre à découvrir les beautés d’un financement qu’il n’a jamais pratiqué. Notre autonomie à la française ne sera donc qu’une autonomie de gestion à l’intérieur de la dépendance financière et du contrôle politique final qui va avec. Le changement est moins spectaculaire que le mot ne le suggère.

D’autres modèles étaient possibles ?

Certains pays de l’Est comme la Pologne ont pris un parti radical dans les années 1990. L’Etat a opéré une dotation des universités en capital et elles sont devenues des établissements indépendants. A elles de faire fructifier leurs moyens et de définir leur politique. Si un tel changement était exclu chez nous, ce n’est pas seulement en raison du « conservatisme » français. C’est aussi et surtout que notre système n’est pas si mauvais et que tout le monde le sait, peu ou prou. A côté de ses défauts manifestes, il possède des vertus cachées. On pourrait même soutenir, de manière provocatrice, qu’il est l’un des plus compétitifs du monde, dans la mesure où il est l’un de ceux qui font le mieux avec le moins d’argent. C’est bien la définition de la compétitivité, non ? Dans beaucoup de disciplines, nous sommes loin d’être ridicules par rapport à nos collègues américains, avec des moyens dix fois moindres.

Et vous pensez que le grand public en a une vision déformée ?

Comment le connaîtrait-il ? L’image romantique du chercheur dissimule une réalité très différente. La recherche est probablement le secteur le plus compétitif, le plus concurrentiel, le plus soumis à la pression de tous les secteurs de la vie sociale. C’est d’ailleurs l’un des motifs de la désaffection pour les sciences. Il faut une vocation solidement chevillée au corps pour endurer cette vie de moine-soldat, où vous avez à vous battre tous les jours pour rester dans le coup, obtenir des moyens, faire valider vos résultats, le tout pour un salaire sans aucun rapport avec ceux des cadres de l’économie. Il y a quelque chose de fou dans le besoin d’en rajouter une couche et de resserrer encore le contrôle, comme si les chercheurs n’étaient pas capables de détecter seuls les sujets porteurs, comme s’ils étaient assez stupides pour aller s’embourber dans des domaines qui n’ont aucun intérêt pour personne. Le pire à mes yeux pour l’avenir est dans cette prétention à programmer la recherche. Comme s’il pouvait exister des méta-chercheurs en position de piloter le travail des autres ! La situation normale est celle du chercheur qui soumet un projet à des instances qui le jugent réaliste, ou prioritaire, compte tenu des moyens disponibles, exactement comme un banquier prend un risque en prêtant de l’argent à une entreprise. Mais l’idée ne peut venir que du chercheur ! Autrement, le conformisme est garanti. C’est une machine à tuer l’originalité dans l’oeuf qui se met en place.

Quelles conséquences l’autonomie aura-t-elle sur la vie professionnelle des enseignants-chercheurs ?

L’autonomie entraîne le passage des enseignants-chercheurs sous la coupe de l’université où ils travaillent. L’établissement, à l’instar de n’importe quelle autre organisation ou entreprise, se voit doté d’une gestion de ses ressources humaines, avec des capacités de définition des carrières et, dans une certaine mesure, des rémunérations. C’est un changement fondamental, puisque d’un statut qui faisait de lui un agent indépendant du progrès de la connaissance, recruté par des procédures rigoureuses et évalué par ses pairs, il passe à celui d’employé de cet établissement.

Jusqu’où va ce « changement fondamental » ?

C’est un changement complet de métier. Il est visible que la mesure de cette transformation n’a pas été prise. L’autonomie des universités veut dire en pratique la mise au pas des universitaires. Toute la philosophie de la loi se ramène à la seule idée de la droite en matière d’éducation, qui est de créer des patrons de PME à tous les niveaux, de la maternelle à l’université. Il paraît que c’est le secret de l’efficacité. On peut juger que le statut antérieur était archaïque et n’était plus tenable à l’époque d’une université de masse, mais encore fallait-il expliciter les termes de cette mutation et clarifier les conséquences à en tirer. Ce statut était un concentré de l’idée du service public à la française, avec ses équilibres subtils entre la méritocratie, l’émulation et l’égalité. Toutes les universités ne sont pas égales, personne ne l’ignore, mais tout le monde est traité de la même façon. Il n’y a rien de sacro-saint là-dedans, mais on ne peut toucher à tels produits de l’histoire qu’en pleine connaissance de cause et en mettant toutes les données sur la table.

C’est donc tout le fonctionnement de notre société qui est interrogé là?

Le problème universitaire est un bon exemple du problème général posé à la société française, celui d’assurer l’adéquation à la marche du monde de notre modèle hérité de l’histoire et organisé autour de l’idée de République. Toute la difficulté est de faire évoluer ce modèle sans brader notre héritage dit républicain. Nous ne verserons pas d’un seul coup dans un modèle compétitif et privé qui n’a jamais été dans notre histoire. Comment intégrer davantage de décentralisation et d’initiative, tout en maintenant un Etat garant de l’intérêt général et de l’égalité des services ? C’est ce point d’équilibre entre les mutations nécessaires et la persistance de son identité historique que le pays recherche. Il n’est pas conservateur : il est réactif. Mais pour conduire ce genre d’évolutions, il faut procéder à découvert, oser le débat public.

Ce qui a été absolument évité…

Le gouvernement a fait le choix d’une offensive éclair, sur la base d’une grande méconnaissance du terrain universitaire. Probablement, ce sentiment d’urgence a-t-il été multiplié par le choc du classement mondial des universités fait par l’université de Shanghaï, qui a secoué nos élites dirigeantes, sans leur inspirer, hélas, le souci de se mettre au courant. Si vous ajoutez à cela une image d’Epinal de ce qu’est le système universitaire américain, aussi typique du sarkozysme que largement fausse, plus l’idée que n’importe quelle stratégie de communication bien menée vient à bout de tous les problèmes, vous avez les principaux ingrédients de la crise actuelle.

Quelle sortie de crise imaginez-vous ?

Quelle que soit l’issue du mouvement, le problème de l’université ne sera pas réglé. Le pourrissement est (…) fatal, mais la question restera béante et resurgira. Si le gouvernement croit que parce qu’il a gagné une bataille, il a gagné la guerre, il se trompe. La conséquence la plus grave sera sans doute une détérioration supplémentaire de l’image de l’université, ce qui entraînera la fuite des étudiants qui ont le choix vers d’autres formes d’enseignement supérieur et ne laissera plus à l’université que les étudiants non sélectionnés ailleurs. De quoi rendre le problème encore un peu plus difficile.

Propos recueillis par Maryline Baumard et Marc Dupuis

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Intervention de circonstance, Université

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Crise économique et crise démocratique : Trois questions à Marcel Gauchet

Institut d’Etudes Politiques, Strasbourg, 16 avril 2009

A l’occasion d’une conférence intitulée « crise économique et crise démocratique  » organisée par l’AUP (Aumônerie Universitaire Protestante), le BDE (Bureau des Elèves) de l’Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg et l’association Sciences Po Forum, Marcel Gauchet a répondu à quelques questions des étudiants concernant la crise. Continuer la lecture

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Deux videos : Redonner du sens aux savoirs

Le Mouvement Démocrate organisait samedi 4 avril 2009 sa deuxième Université Populaire intitulée « Panne de transmission, panne d’éducation ». Parmi les invités, Marie-Claude Blais sur le thème « famille et cole » et Marcel Gauchet qui est intervenu sur le thème « redonner du sens au savoir ».

Pour Marcel Gauchet, la question des savoirs est une des impasses de la pédagogie car le problème est posé de la façon suivante : les enfants s’ennuient à l’école, les jeunes s’ennuient au lycée, les étudiants s’ennuient à l’université. Conclusion : changeons les méthodes pédagogiques pour rendre les connaissances attractives ! Telle est la logique de la réforme Darcos du lycée : on crée des enseignements à options afin de susciter une demande naturelle de la part des élèves qui, du moins, ne pourront plus récriminer s’ils s’ennuient…

Mais on ne se pose jamais la question de la place du savoir dans les sociétés dites de la connaissance. Or la culture a perdu son rôle traditionnel. L’humanisation passait par la capacité de s’élever au-dessus de la nature spontanée. Devenir humain impliquait de se cultiver, d’acquérir vis-à-vis de soi ce recul réflexif et cette maîtrise qui passe par l’accumulation de connaissances. On n’est pas affronté à un problème technique et pédagogique (le fonctionnement de l’institution scolaire) mais à un phénomène anthropologique : le postulat traditionnel de la curiosité, de la soif de connaissance ne semble plus valide.

Ce socle de l’acte de transmission est ébranlé. D’implicites qu’elles étaient, les bases mêmes de la transmission des savoirs doivent être désormais explicitées. Les réponses demandent une intelligence collective et la délibération entre citoyens. Il faut refaire de l’éducation un véritable problème politique car la reproduction culturelle de nos sociétés n’est plus assurée.

Liens vers les vidéos :

et

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Education, Intervention de fond, Vidéos et Sons

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Entretien : « Arrêtons de demander à l’école tout et son contraire »

Famille & éducation, n°476, mars-avril 2009

Aujourd’hui, qu’est-ce qui change dans les conditions d’éducation au sein des familles ? Quelles sont les principales difficultés qu’elles rencontrent ?

Marcel Gauchet : Remontons à la racine. Pourquoi cette instabilité au sein des couples ? Tout simplement à cause des transformations de la famille, des attentes des individus à son égard, qui font d’elle essentiellement une institution privée et affective, donc sujette à des tensions privées et affectives ! Auparavant, les difficultés privées n’étaient pas sur le devant de la scène et le rapport à l’enfant était différent. L’ancienne famille institutionnelle considérait que sa priorité était de préparer les enfants à la vie en société. La famille d’aujourd’hui, vise avant tout le bonheur de ses membres. Cela signifie, tous les éducateurs le disent et beaucoup d’enquêtes le démontrent, qu’énormément de parents, souvent inconsciemment, exigent de l’école qu’elle prenne en charge ces apprentissages de la vie en société qui constituaient auparavant leur rôle. Continuer la lecture

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Quand l’école ne va plus de soi…

Interview sur « Parenthèse » France inter, le 28 février 2009

A quelles conditions l’école peut-elle encore répondre à ses missions d’éducation? Relations avec la famille, transmissions des savoirs, questions d’autorité, autant de nouveaux enjeux qui se posent à elle sur fond de suppressions de postes.

Laurence Luret – Marcel Gauchet, vous êtes philosophe et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Si je vous ai invité ce matin, c’est parce que vous avez publié un livre remarquable coécrit avec Marie-Claude Blais et Dominique Ottavi. Conditions de l’éducation, c’est son titre, c’est-à-dire à quelles conditions l’école peut-elle répondre à ses missions ? C’est un livre qui résonne fortement en cette période de suppression de postes. Or, vous qui avez toujours eu à cœur la sauvegarde de l’école, surprise, vous nous dîtes que plus de postes ou moins de postes c’est un faux problème. Pourquoi ?

Marcel Gauchet – C’est un vrai problème. Bien entendu, je ne songerai pas à nier l’importance des éléments matériels dans la vie de l’éducation mais les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans ce domaine ne se résument pas à ces questions de moyens matériels. Imaginons, par un gouvernement extraordinairement généreux, que les moyens optimaux soient réunis. Nous serions quand même confrontés à des difficultés de fond dans l’exercice de l’éducation. D’ailleurs, le problème ne se résume pas qu’aux problèmes de l’école. Il est beaucoup plus large.

Justement, vous dégagez quatre grands enjeux pour l’école. Le premier, c’est la relation entre l’école et la famille. On sent bien un malaise des deux côtés d’ailleurs. Pourquoi est-ce devenu problématique ?

Il faut partir de la situation antérieure. C’est un problème tout à fait nouveau. Ce dont on s’aperçoit de plus en plus, c’est que cet accord qui paraissait naturel – les familles et l’école veulent ensemble éduquer les enfants ou les jeunes – ne va plus du tout de soi. Le fond du problème tient évidemment, sans surprise, aux énormes transformations de la famille qui sont survenues depuis une trentaine d’années et qui ont créées littéralement une nouvelle famille. Non plus la « famille-institution » à laquelle on était habituée mais une « famille privatisée » beaucoup plus informelle et où l’essentiel sont les rapports affectifs entre les parents mais aussi entre les parents et les enfants et où, du coup, la relation avec l’école se place sous le signe d’une certaine incompréhension. D’un côté, les familles demandent de l’éducation, plus que jamais d’une certaine manière, mais, j’oserais dire qu’elles en demandent trop. Elles demandent à l’école, en quelques sortes, de faire leur travail plus celui que l’école faisait habituellement parce qu’elles n’ont plus à cœur, dans ce cadre affectif qu’est devenu le leur, de se consacrer à la tâche difficile de socialisation.

Les familles veulent bien que l’école socialise l’enfant. Or, comme cet enfant est le leur, il est un peu particulier et il faudrait le traiter d’un façon particulière.

Voilà. L’école est forcément une institution égalitaire dont la règle est de traiter tout le monde de la même façon, de traiter l’enfant avec égard mais de le traiter à l’identique. C’est la règle d’une institution. Pour les familles, en revanche, l’enfant c’est le singulier, celui qui n’est pas comme les autres puisque c’est le leur. Cela se comprend très bien mais du coup il y a un choc entre les réquisitions de la famille et la manière dont fonctionne l’institution.

Deuxième enjeu : la perte du sens des savoirs. Quoi apprendre ? Comment ? On dit qu’aujourd’hui il faut apprendre à apprendre. Vous en pensez quoi ?

Je pense que c’est un très noble objectif. Ce débat n’a cessé de croître et d’embellir avec la mise à disposition technique de moyens de plus en plus efficaces qui ont constitués une sorte de modèle idéal implicite de l’apprentissage qui n’a rien à voir avec la construction des cadres intellectuels, qui est tout à fait autre chose, que la mission de l’école est d’opérer. Pour comprendre l’histoire, il faut avoir dans l’esprit ce que veut dire une chronologie : une succession d’évènements qui se font suite de manière raisonnée. Ce n’est pas simplement apprendre des dates par cœur. C’était l’exemple justement de l’école absurde d’autrefois. C’est au contraire avoir dans l’esprit le cadre intellectuel qui permet de mettre en ordre ces dates et de voir qu’il y a entre elles des relations sensées. Ca c’est le travail de l’école et ça, aucune technique avec laquelle on aurait une relation spontanée ne peut vous l’offrir.

Troisième enjeu : la question de l’autorité dont a besoin l’école. C’est une question à la mode avec un retour aux traditions et sans véritable réflexion, dites-vous. Comment et sur quoi fonder cette autorité ?

C’est la question empoisonnée par excellence sur laquelle nous errons entre des positions toutes plus absurdes les unes que les autres, celle des réactionnaires qui pensent qu’il faudrait rétablir on ne sait pas très bien quoi et sur quelles bases et celle des gens qui pensent qu’en fait l’autorité n’existe pas. Je crois qu’il est grand temps précisément de voir de quoi il s’agit. En quoi la vie sociale a besoin d’autorité ? Elle a besoin d’autorité, c’est très simple, parce que c’est le moyen d’économiser la force. Là où il n’y a pas l’autorité, il n’y a que la contrainte légale. On ne va pas mettre de la police dans les écoles même s’il y a des gens qui y pensent. Cela ne me paraît pas une solution très constructive. Je doute qu’elle produirait les effets escomptés d’ailleurs parce que, précisément, c’est la paix dont on a besoin pour étudier dans la confiance. Personne ne fera jamais cela par la contrainte. Cela n’existe pas.

Quatrième enjeu : l’éducation de l’enfant dans sa totalité. Là, on aborde un problème encore plus complexe. Pourquoi l’absence de prise en compte de la globalité de la vie quotidienne de l’enfant, du centre de loisir à l’ordinateur à domicile, est-elle un obstacle majeur aux conditions de l’enseignement ?

Ce dont les enfants ont par-dessus tout besoin, c’est qu’on s’occupe d’eux.

De la présence.

Oui, qu’on s’intéresse à ce qu’ils font. Evidemment que l’abondance matérielle dans laquelle on les fait vivre est souvent un substitut à l’intérêt, y compris pour les conditions réelles dans lesquelles ils vivent qui ne peuvent être interprétées par eux que sous un signe très simple : Ils dérangent. Effectivement, dans la vie d’aujourd’hui, c’est compliqué. Au fond, le grand problème c’est de garder les enfants. On le voit bien quand il y a une grève dans l’Education nationale. C’est le problème nationale numéro un. Il est temps de revenir à un examen complet non pas simplement de ce qui se passe dans les classes mais de la vie que mènent les enfants pour comprendre comment une éducation peu s’insérer dans cette vie parce que cela ne va pas de soi. Il n’y a pas d’accord naturel. Ce n’est pas le développement spontané qui se fait tout seul au travers de l’école. Il faut qu’il soit porté par un environnement social où l’éducation soit au rendez-vous à tout les moments et de façon convergente.

 

Merci Marcel Gauchet.

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L’éducation face aux évolutions de la société

Conférence-débat du mardi 10 février 2009 avec Marcel Gauchet et Marie-Claude Blais autour de leur livre « Conditions de l’éducation » à la Maison de l’Université de Rouen. Dans le livre, l’analyse se développe sur quatre fronts : les relations de l’école avec la famille, le sens des savoirs qu’elle dispense, l’autorité dont elle a besoin, sa place dans la société. « Que faire de savoirs qui prennent la tête, dans un monde où l’aspiration primordiale est à être bien dans sa peau », s’interroge Marcel Gauchet.

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La famille ne veut plus socialiser et s’en décharge sur l’école.

Famille Chrétienne, 6 février 2009

À quoi prépare l’école ? Quel est le rôle des familles ? Qu’est-ce qui a changé dans la façon d’éduquer les enfants ? La famille d’aujourd’hui a changé. Le statut de l’enfant aussi. Il est maintenant au centre de tout et cela l’empêche de se projeter vers un avenir collectif. Vouloir le bonheur de l’enfant tout de suite ne lui est pas forcément profitable. L’enfant roi est très isolé du monde des adultes et du monde réel. Co-auteur de l’essai Conditions de l’éducation, Marcel Gauchet répond à Famille Chrétienne.

La question éducative revient en force dans le débat public, on le voit par exemple à travers les polémiques sur Françoise Dolto. L’éducation des enfants est-elle devenue si problématique ?

Le rapport des familles à l’institution éducative a considérablement changé. Familles et institutions n’ont plus la même manière de se représenter ce qu’est l’éducation sur un aspect essentiel : le travail de socialisation qui s’opère au travers de l’acquisition des connaissances. C’est ça, le nœud. Continuer la lecture

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